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Les recommandations du CNESCO pour les langues vivantes

En 2019, le conseil national de l’évaluation du système scolaire (CNESCO) publiait une synthèse des pratiques efficaces en matière d’apprentissage d’une langue étrangère. Que faut-il retenir ?

7 recommandations phares pour mieux accompagner les élèves

Pour aller plus loin : Le dossier du CNESCO

1. Travailler sur l’oral de manière progressive, de la maternelle jusqu’au lycée

Au regard des enjeux et des évaluations des élèves en langues, l’oral apparait comme une priorité. Or, la recherche montre que certaines périodes de la vie sont plus propices à travailler certains aspects de la langue. Il est donc nécessaire de construire un parcours progressif de l’apprentissage de l’oral, tout au long de la scolarité, afin de s’adapter au rythme de développement des élèves et ainsi d’optimiser leurs capacités d’apprentissage. Pour cela, les enseignants devront pouvoir s’appuyer sur une plateforme nationale de ressources pédagogiques regroupant des ressources numériques (vidéo, audio…).
Dès l’école maternelle, se concentrer sur la musicalité des langues
Privilégier la découverte des rythmes, des accents et des intonations grâce à l’écoute et à la répétition de chants et comptines en langues étrangères. À cet âge, selon les résultats de recherches, la capacité des élèves à imiter est maximale et ils sont également plus réceptifs aux intonations. Pour cela, les professeurs des écoles doivent être formés à la phonologie, et la présence d’assistants étrangers à leurs côtés doit être renforcée.
Dès le CP, écouter régulièrement
Entraîner les élèves à la compréhension globale de l’oral en leur faisant écouter la langue de façon très régulière. Les supports utilisés portent sur des sujets proches les uns des autres afin de favoriser leur compréhension du vocabulaire utilisé et donc sa mémorisation.
Dès le CE2, travailler l’expression orale
Développer les compétences d’expression des élèves dans une langue étrangère. À cet âge, la recherche montre que les élèves ont, à la fois, eu le temps de découvrir cette langue et acquis une capacité de raisonnement qui facilite leur capacité à s’exprimer (et non plus seulement à répéter).

2. Guider les élèves vers l’autonomie, en s’appuyant notamment sur les outils numériques

Les instructions officielles insistent sur l’importance du travail en autonomie des élèves et de nombreux dispositifs pédagogiques existent. Pour autant, les recherches montrent qu’il est nécessaire d’accompagner les élèves dans ce processus d’« autonomisation » afin de ne pas exclure les plus fragiles. Cette réflexion autour de l’autonomie de l’élève peut permettre de travailler différentes activités langagières.

 > Par exemple…
Proposer une écoute différenciée
Activités d’écoute autonome, avec guidage pour les élèves les plus fragiles et en autorégulation pour les élèves les plus performants.

Recueillir des propositions d’élèves
Création d’un padlet pour que chacun puisse déposer des textes, des vidéos, des fichiers audio ou des images qui pourront être utilisés en classe.
Permettre une interaction
Organisation de visioconférences pour faire échanger les élèves avec des locuteurs natifs ou avec d’autres élèves qui apprennent la même langue (eTwinning, tele-tandem®).

Le travail en autonomie doit être pensé dès la création ou le réaménagement des établissements. La salle de classe doit être adaptée et peut, notamment, intégrer des espaces de ressources (accrochage sur panneaux muraux, « coin langues »…).

3. Créer des ponts entre les différentes langues et cultures

Les recherches montrent que découvrir plusieurs langues dès le plus jeune âge sera bénéfique, par la suite, à l’apprentissage des langues. L’apprentissage des élèves sera favorisé par la mise en relation des différentes langues qu’ils connaissent (une langue utilisée à la maison, une autre langue vivante apprise…) d’un point de vue lexical, grammatical, phonologique… Ainsi, les enseignants peuvent tirer parti des similitudes qui peuvent exister entre les différentes langues, tant au niveau de leur fonctionnement que de leur lexique.
Pour cela, les enseignants sont amenés à identifier ce qui est spécifique à chaque langue et ce qui leur est commun. Ils encouragent également les élèves à s’appuyer sur une autre langue qu’ils connaissent déjà pour développer des stratégies de compréhension.
 >Par exemple…
L’intercompréhension
En cours d’allemand, un élève pourra s’appuyer sur les similitudes avec l’anglais pour mieux comprendre un texte ou une intervention orale.

De plus, il est important de favoriser une approche interculturelle des langues. Pour dépasser une vision « folklorique » (« les Anglais boivent du thé à 17h », « les Italiens ne mangent que des pizzas »), les enseignants peuvent aborder en priorité les points communs entre les cultures plutôt que leurs différences. Cela peut se traduire par un travail sur des albums traduits en plusieurs langues (des contes traditionnels par exemple). Les enseignants doivent être formés spécifiquement à cette approche interculturelle.
L’approche interculturelle et inter-langues peut également s’appuyer sur les parents d’élèves parlant une ou plusieurs langues étrangères, ou sur des associations culturelles.

4. Évaluation : reconnaitre un « droit à l’erreur » et mieux cibler les compétences réelles des élèves

Plus que dans toute autre discipline, apprendre une langue vivante engage les élèves dans toutes leurs dimensions : culturelles, relationnelles, émotionnelles, corporelles, cognitives… L’évaluation doit donc prendre en compte l’anxiété liée à l’apprentissage d’une langue, particulièrement chez les adolescents. De plus, la maitrise des langues ne peut se résumer à un seul indicateur de notation, car elle recouvre des compétences multiples : maitrise du lexique, de la grammaire et de la phonologie, capacité à comprendre et à s’exprimer à l’écrit et à l’oral, capacité à se décentrer, à entrer dans une autre culture, à aller à la rencontre de l’autre et interagir avec lui. De ces constats résultent plusieurs orientations :

Reconnaitre un « droit à l’erreur »
Les élèves doivent considérer la classe de langue comme un espace dans lequel ils peuvent faire des essais et se tromper. L’évaluation doit être pensée dans ce cadre. Ainsi, les enseignants sont amenés à identifier ce qui doit être corrigé en priorité et à dédramatiser les erreurs et hésitations. De plus, ils mettent en place des moments où les élèves ne sont pas évalués et développent des temps de co- évaluation et d’auto-évaluation.

Évaluer plus précisément les compétences réelles des jeunes
Au-delà d’une note globale chiffrée, il est important de fournir aux élèves des indicateurs (en compréhension de l’oral, en expression orale…) qui leur précisent ce qu’ils savent et ce qui leur reste à travailler en fonction des objectifs visés.
 >Par exemple…
Préciser les domaines à travailler
Lorsqu’un élève, à l’aise en compréhension de l’écrit, rencontre des difficultés en compréhension de l’oral, l’enseignant peut lui proposer de travailler plus spécifiquement la prononciation des mots qu’il connait à l’écrit pour les reconnaitre à l’oral.

Développer des « évaluations-bilans » tous les trois ans
Pour donner aux élèves des repères sur leur progression, il est nécessaire de proposer une évaluation de leur niveau en langue tous les 3 ans (à chaque fin de cycle). Cette évaluation doit prendre en compte les cinq activités langagières (telles que définies dans le CECRL1) : compréhension de l’écrit, compréhension de l’oral, expression écrite, expression orale en continu, expression orale en interaction.

5. Proposer des cours de langues d’une durée plus courte mais plus régulièrement

La recherche montre que l’apprentissage d’une langue nécessite d’y être exposé régulièrement. Pour cela, il est possible d’envisager une plus grande flexibilité dans l’organisation du temps scolaire, favorable à l’apprentissage des langues.
À volume horaire constant, le temps scolaire dédié aux langues peut être réorganisé afin d’augmenter la régularité des cours de langues.

 > Par exemple…
Au primaire, des séances quotidiennes de 20-25 minutes (au lieu de deux de 45 minutes).
Au collège, quatre ou cinq séances de 45 minutes (au lieu de séances d’1h).

6. Amplifier, sur le temps scolaire, l’exposition aux langues étrangères

Les recherches montrent que les élèves tirent profit d’une exposition massive aux langues étrangères. Pour autant, s’ils sont de plus en plus nombreux à les côtoyer dans leurs pratiques extra-scolaires (vidéos, musique, jeux vidéo…), cela ne se traduit pas nécessairement par des apprentissages. Il est donc nécessaire d’ouvrir plus largement les dispositifs permettant d’amplifier l’exposition aux langues dans le cadre scolaire.

Proposer une autre matière enseignée en langue étrangère
Il est pertinent de développer les dispositifs EMILE (enseignement d’une matière – les SVT ou l’éducation musicale par exemple – par l’intégration d’une langue étrangère), favorables à l’apprentissage de la compréhension et de la production orale ainsi qu’à l’enrichissement du lexique. Les enseignants concernés doivent bénéficier d’une formation de haut niveau pour faire face à la complexité de ce type d’intervention.

Proposer les dispositifs d’exposition renforcée aux langues à tous les élèves
Les dispositifs bi-langues, sections internationales, européennes… favorisent la communication orale (notamment en interaction), enrichissent le lexique et améliorent les compétences cognitives. Actuellement marqué socialement (Cnesco, 2016), leur accès doit donc être ouvert, sur la base du volontariat, à tous les élèves, et non réservé aux élèves les plus performants.

7. Redonner une place à l’enseignement explicite des langues

Depuis une trentaine d’années, l’enseignement des langues se fait majoritairement de manière implicite. Il s’appuie sur une utilisation naturelle de la langue telle qu’elle se pratique en dehors de l’école. Selon les recherches, cette approche, bien que pertinente, doit s’articuler progressivement, dès les premières années d’apprentissage, avec un enseignement explicite de la langue étrangère pour être pleinement efficace.
Concrètement, cela signifie que les enseignants, tout en continuant à travailler sur des situations proches de la vie courante, proposent aux élèves :
 des objectifs clairs et un bilan de ce qu’il faut retenir à la fin de chaque cours ;
 des entrainements systématiques et répétés (sur la grammaire, le lexique…) ;
 des activités de réflexion, en français, sur le fonctionnement de la langue étrangère (analyse des règles grammaticales, construction des mots…) et sur les stratégies des élèves (pour produire un écrit long, pour formuler autrement…).

Pour aller plus loin : Le dossier du CNESCO